AMERIQUE CENTRALE : Travailleurs de la palme au Honduras (juin 2012)

(www.rel-uita.org)

Durant les dernières décennies la plantation à grande échelle de palmiers à huile s’est étendue dans les régions tropicales d’Asie, d’Afrique et d’Amérique Latine. La Rel-UITA ( Réseau régional latino-américain de l’Union Internationale des Travailleurs de l’Alimentation)  s’implique dans la dénonciation de violations des droits humains et de conflits syndicaux liés à ce type de monocultures.

En Amérique Centrale…
Dans le processus de plantations en expansion au Guatemala, au Honduras et au Nicaragua, les pressions de l’entreprise empêchent la syndicalisation. « Il est impossible aux travailleurs de s’organiser : aussitôt les responsables te licencient et te mettent sur une liste noire pour que tu aies des problèmes en cherchant du travail dans d’autres fincas. Entre grands propriétaires il existe une même politique concernant le travail, les droits et le commerce. D’ailleurs, les patrons de la finca, tu ne les vois presque jamais : celui qui embauche c’est le « contratista », qui réside sur place et connaît bien la plantation. Il négocie avec l’entreprise une proposition de travail déterminée : quantité d’hectares à planter, montant et conditions de paiement (à la tâche ou à la journée) et conditions d’alimentation pour les travailleurs. Puis il cherche des travailleurs. »

Conditions de travail.
En général il existe quatre sortes de relations de travail :

  • les travailleurs permanents avec contrat, qui ont accès aux prestations sociales. Dans cette catégorie on trouve les administratifs « de confiance », contremaîtres ou ingénieurs, mais jamais les travailleurs chargés de la récolte ou d’autres tâches directement liées à la plantation.
  • Les travailleurs permanents sans contrat, qui n’ont pas accès aux prestations sociales mais peuvent dans certains cas bénéficier de la sécurité sociale.
  • Les  travailleurs temporaires locaux, qui vivent avec leur famille dans la communauté proche de la plantation, où parfois ils disposent d’une petite parcelle pour leurs cultures de subsistance, mais pour compléter leurs revenus ils assurent un travail saisonnier dans les plantations, sans contrat et sans aucune prestation sociale.
  • Les travailleurs saisonniers qui viennent de loin. Quand le contratista a besoin d’effectifs pour la saison,  il lance un appel par différents moyens de communication dans d’autres zones du pays. Les gens qui n’ont pas d’emploi dans leur communauté et qui répondent à cet appel vivent dans de très mauvaises conditions au sein des plantations, sans prestations sociales, loin de leur famille, sans l’apport qu’ils avaient de leur parcelle. Ils sont livrés aux incertitudes des saisons et aux conditions imposées par les contratistas et ingénieurs.

Vraiment social… et pas très « bio »…
Les femmes sont embauchées pour travailler dans  les pépinières, avec le même horaire que les hommes mais avec un salaire inférieur. Une stratégie appliquée aux travailleurs non permanents consiste à les embaucher pour deux ou trois mois et à les congédier ensuite. Ils passent un mois chez eux puis on  les réembauche. Dans cette embauche en pointillé il n’y a pas à les enregistrer pour le Ministère du Travail ni à leur assurer de prestations sociales.
Plus de 90 % des travailleurs n’ont pas de prestations sociales, ils travaillent en régime de sous-contrat et avec la pression de savoir que derrière eux, une liste de sans-emplois espèrent prendre leur place. Il est donc pratiquement impossible que ces gens s’organisent en syndicats pour exiger que leurs droits soient respectés ou demander des améliorations de leurs conditions de travail.
Dans ce modèle de production d’une espèce exotique à grande échelle, il faut signaler l’utilisation d’agrotoxiques. A ce sujet, il n’existe guère d’information, par absence de registre. Mais tous les travailleurs parlent du manque d’hygiène et de sécurité dans l’utilisation des produits. Souvent les sacs utilisés pour les appliquer se déchirent sur le corps du travailleur. Il y a des cas d’intoxications, et tout se « solutionne » avec le contratista. Quand un travailleur est momentanément hospitalisé, il lui est ensuite très difficile de poursuivre un traitement, d’accéder à des médicaments. En résumé, « pas de travail, pas d’argent ». Il y a des cas d’affections permanentes, de décès. Les gens sont dans une situation de désarroi total. Les entreprises ne veulent rien savoir de ces situations, elles demeurent étrangères à ce qui survient dans les plantations.

Les monocultures : Sur quelles terres ?
L’expansion de la culture du palmier à huile  implique une évolution dans la propriété et l’utilisation de la terre. Au Honduras comme au Guatemala et au Nicaragua, la palme remplace d’autres monocultures : banane, coton, canne à sucre, détruites soit à la suite  de phénomènes climatiques, soit par la chute des prix sur le marché mondial. Mais surtout ces monocultures occupent des terres qui étaient auparavant cultivées  par des petits paysans et des indigènes.
Le principal impact de la monoculture est la concentration et l’accaparement des terres par un petit nombre de grands propriétaires. Les chefs d’entreprise arrivent pour acheter la terre aux communautés indigènes et paysannes. Bien souvent ce n’est pas simple : les communautés implantées ici depuis des siècles avec leurs cultures de subsistance  refusent de vendre. Très peu de familles vendent volontairement, le plus fréquemment la vente s’obtient par la menace et la répression ou encore par la ruse, avec  des promesses qui ne seront jamais tenues.
Dans cette situation, les familles réagissent de manière différente : certaines refusent de vendre et s’affrontent aux menaces et à la répression, d’autres vendent parce qu’elles ont été menacées mais gardent une petite parcelle pour des cultures alimentaires de survie. Ou bien elles vendent tout pour louer ensuite une demi-manzana (0,35 ha) pour subsister. Les familles qui vendent tout passent du stade de petit producteur avec un certain degré d’autonomie à celui de dépendance totale de la finca productrice de palme. Ainsi elles n’ont plus qu’à accepter toutes les conditions de travail qu’on leur impose.

Un mécanisme de « Développement Propre »…
Au début les plantations de palmier à huile étaient destinées à l’industrie pharmaceutique et à la production de comestibles. Puis avec l’excuse du changement climatique, on a voulu produire des biocarburants. Pour promouvoir ces initiatives, des autorités comme la BID (Banque Interaméricaine de Développement) ou la Banque Mondiale  affirment que ces plantations apportent développement, investissement et emploi aux zones rurales très pauvres. Depuis la décennie 90, les organismes financiers internationaux promeuvent les monocultures de palme africaine comme MDL (Mécanismes de Développement Propre) dans les pays de l’hémisphère sud. En réalité, ces cultures génèrent le travail esclave, et provoquent l’insécurité alimentaire, les conflits et la mort.

Réactions des gouvernements locaux.
Soutien total aux grands propriétaires,  discours bien connu : cela apporte bien-être et travail. Lois sur le travail temporaire, contrats par périodes de 3 jours, pas de droit de manifestations…

Le rôle de Rel-UITA.
L’organisation constate que c’est dans ce secteur, ainsi que dans celui de la canne à sucre, qu’il y a le plus de problèmes, de répression et d’atteintes diverses aux droits de la personne. Travail dans les médias pour faire connaître ces réalités aux gouvernements locaux et à la communauté internationale. C’est ainsi que certains cas concrets (Bajo Aguan, au Honduras) ont été signalés dans le rapport fourni au Haut Commissaire des Droits de l’Homme aux Nations Unies et devant la Commission Interaméricaine des Droits de l’Homme. A suivre…

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