AMERIQUE CENTRALE : La sécheresse menace la sécurité alimentaire.

(ADITAL, septembre 2014)

Le 14 août, les consommateurs locaux découvrirent, consternés, que la grave sécheresse qui avait anéanti les cultures de toute l’Amérique Centrale, avait aussi élevé les prix du maïs par quintal (46 kg) de 40 Quetzales (5 dollars US) sur le marché municipal de Quetzaltenango, département à prédominance indigène situé sur l’altiplano guatémaltèque où cette céréale est le principal aliment de base.

On enregistre aussi des augmentations de prix similaires dans les départements de Retalhuleu et San Marcos, ce qui affecte les agriculteurs dont beaucoup vivent en dessous du seuil de pauvreté et sont obligés d’acheter maïs et frijoles sur les marchés locaux quand le rendement de leurs propres cultures est insuffisant pour alimenter leur famille.

La sécheresse a été un problème récurrent en Amérique Centrale durant la décennie passée et l’on prévoit qu’en cette fin d’année la situation empirera, conséquence du phénomène El Niño, qui se produit périodiquement et se caractérise par le réchauffement des eaux de surface de l’Océan Pacifique, donnant lieu à des pluies torrentielles en Amérique du Sud et à la sécheresse en Amérique Centrale.

Selon les estimations du gouvernement guatémaltèque, au moins 50 % des cultures du « corridor sec » – zone géographique qui inclut les départements de Chiquimula, Jutiapa, Baja Verapaz, Retalhuleu, Santa Rosa, Zacapa, Quiché, Suchitepéquez, Jalapa et Huehuetenango -, pourraient être perdues du fait de la sécheresse, mettant en péril la sécurité alimentaire de 168 278 familles et obligeant les autorités à déclarer l’état d’urgence.

L’association Nationale du Café (ANACAFE) a également alerté début août que l’impact de la sécheresse dans deux des régions productrices de café du pays – Santa Rosa et Jutiapa -, provoquerait une chute de 3 % dans la production de la saison prochaine, ce qui affectera aussi les travailleurs saisonniers qui viennent chaque année dans ces départements à la recherche d’une embauche.
Crise humanitaire.

Selon le programme Mondial d’Aliments des Nations Unies (PMA), plus de 2,8 millions de personnes au Guatemala, au nord du Honduras et à l’ouest du Salvador ont des problèmes pour s’alimenter.

« C’est une crise humanitaire en marche, les gens souffrent déjà de la faim. La situation de ces gens est critique en temps normal, alors s’ils perdent leurs récoltes, cele devient très grave. » dit le porte parole du PMA pour l’Amérique Centrale et les Caraïbes, Alejandro López, durant une conférence de presse réalisée le 29 août.

En réponse à la sécheresse, le gouvernement du Guatemala a annoncé qu’il distribuera 4000 tonnes d’aide alimentaire à plus de 170 000 familles affectées, en utilisant les réserves du PMA.

Cependant, López a expliqué que plus de 70 000 tonnes d’aliments sont nécessaires tous les trois mois pour alimenter un million de personnes et que le PMA n’en a que 12 200 tonnes, ce qui signifie qu’il va manquer des ressources nécessaires pour alimenter les victimes de la sécheresse en Amérique Centrale.

Le Conseil de Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle (CONASAN) du Guatemala, entité coordinatrice incluant les représentants des ministères de l’Agriculture, de la Santé et de ‘Environnement, ainsi que le vice-président et des organisations de la société civile, a publié début août un rapport déterminant les 208 municipios les plus affectés par la sécheresse et estimé que le gouvernement aurait besoin d’au moins 340 millions de Quetzales ( 43,3 millions de dollars) pour distribuer les ressources nécessaires afin d’éviter la crainte d’une famine généralisée dans cette zone. Toutefois, on ne sait pas encore comment le gouvernement obtiendra ces ressources.

Quant au Nicaragua, où les prix du frijol rouge ont grimpé de 129 % entre janvier et juin 2014, le Président Daniel Ortega a autorisé récemment l’importation de 40 000 tonnes de frijol rouge et de 73 500 tonnes de maïs blanc pour faire baisser les prix.

Au Honduras, le gouvernement distribue du riz, des frijoles, de la farine et des suppléments vitaminés aux 76 000 familles affectées par la sécheresse.
Pas de stratégie à long terme.

Durant la décennie passée, des mesures furent prises par les administrations successives pour affronter le problème, incluant des stratégies à long terme pour réduire l’impact du changement climatique et protéger la sécurité alimentaire des communautés agricoles. Mais le niveau du problème et sa récurrence illustrent combien ces mesures étaient peu appropriées.

Selon une étude publiée par l’Institut d’Agriculture, de Ressources Naturelles et d’Environnement (IARNA) de l’Université Rafael Landivar au Guatemala, le pays a souffert deux graves sécheresses : l’une en 2001 qui mit en péril la sécurité alimentaire de 1,4 million de personnes et une seconde en 2009, qui fut encore plus forte et toucha 2,5 millions de personnes qui endurèrent la faim.

L’IARNA précise que le changement climatique est un phénomène global et qu’ une petite nation comme le Guatemala ne peut guère prétendre réduire sa vulnérabilité face à ce phénomène ; des administrations successives ont cessé d’investir à répétition dans la technologie nécessaire et l’infrastructure qui garantissent la gestion adéquate des ressources hydriques et permettent d’éviter la sécheresse dans l’est du pays.

L’étude énumère une série de mesures qui pourraient être mises en œuvre afin de réduire l’impact de la sécheresse dans cette région, incluant l’irrigation par le système de goutte à goutte, des techniques agricoles plus efficientes, et la construction de réservoirs pour assurer aux communautés l’accès aux ressources hydriques en période de pénurie.

Un autre problème grave dans toute la région est que la majorité des pays manquent d’un cadre légal qui régulerait la gestion des ressources hydriques de ces pays, garantirait aux communautés l’accès à l’eau et établirait des peines sévères pour éviter la pollution des cours d’eau et des lacs.

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