NICARAGUA : Témoignage (juillet 2013) – Extraits.

Ce témoignage émane d’un membre du CIR, (Christliche Iniciative Romero), de Düsseldorf, qui effectue chaque année un séjour au Nicaragua pour visiter les projets de solidarité soutenus par le CIR.)

(…) Les  relations entre mouvements féministes et Eglises sont très tendues depuis plusieurs années dans le pays. En 2006, les Eglises catholiques et évangéliques avaient, malgré les violentes protestations des femmes, imposé au gouvernement l’interdiction de tout type d’avortement. Et actuellement, les mêmes Eglises se déchainent contre la loi 779, « Loi Intégrale  contre les violences envers les femmes ». Cette loi précise pour la première fois les différentes formes de violences, désignant les faits par leur nom, tels que « l’assassinat de femme pour motif de haine » (fémicidio), et prévoyant les mesures de prévention et les sanctions.Pour de grands secteurs de l’Eglise, imprégnée de machisme, cette loi est ressentie comme une épine dans leur pied. Les représentants de l’Eglise refusent tout particulièrement la possibilité de poursuivre et de punir pénalement les violences interfamiliales, au lieu de se contenter comme avant de  préconiser une « médiation » entre la femme victime et l’homme auteur des faits violents..

Pour l’organisation féministe « Maria Elena Cuadra », cet aspect est capital car « Beaucoup de femmes battues étaient contraintes par la police et les tribunaux d’accepter, encore et encore,  une « médiation », jusqu’à ce que la médiation devienne inutile… car l’homme avait battu à mort sa partenaire. Il faut que cela cesse ! »

Pour les responsables ecclésiastiques, le maintien du noyau familial et la réconciliation sont LA priorité. Au cours de mes visites annuelles au Nicaragua, aucun thème ne fut autant discuté : en 2011 les femmes manifestaient pour obtenir la promulgation de cette loi; en 2012 elles célébraient sa prochaine application; et en 2013 elles défendent par tous les moyens cette loi contre les secteurs réactionnaires de la société. Affaire à suivre ……

(…) D’après mes descriptions on pourrait avoir l’impression qu’à la base, les choses bougent, que la société civile a le vent en poupe et que les voix critiques des organisations de base s’élèvent dans le pays. Mais il n’en est rien. Mise à part la lutte des organisations de femmes, c’est le silence au Nicaragua. Depuis que le FSLN, parti des Sandinistes au pouvoir, a atteint une large majorité, on n’entend plus guère l’opposition. Et ce qui suscite les critiques envers le président Ortega, ce n’est plus la répression comme il y a quelques années, mais c’est plutôt le succès – à court terme –  de sa politique.

De nombreux problèmes quotidiens ont été atténués, grâce à l’abondant soutien financier du Venezuela : depuis l’approvisionnement déficitaire en eau et en courant électrique, jusqu’à la misère de l’éducation et de la santé, ainsi qu’aux difficiles conditions de logement de la majorité de la population. Dans tous les domaines, des améliorations sont sensibles, ce qui vaut au gouvernement, dans les enquêtes et les élections, un grand appui d’environ deux tiers de la population.

La critique – fondée –  de l’opposition sur le gouvernement par la famille  présidentielle Ortega-Murillo, sur les structures non démocratiques de la société à tous les niveaux de l’Etat, et sur le contrôle de la société jusque dans ses moindres recoins  par un appareil quasi étatique, traduit un FSLN plus fort que jamais… mais laisse le sentiment d’une difficile période au Nicaragua.

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