Publié par Alencontre le 13 août 2018 par Silvana Aiudi
Le Sénat argentin a rejeté [le 8 août 2018] le projet de Loi d’interruption volontaire de grossesse (IVG). Dans les rues, une puissante «marée verte» [les foulards de cette couleur sont le «badge» du mouvement] s’est manifestée pour le droit des femmes à décider leur maternité. Malgré le rejet, la question du droit l’avortement est installée dans la société argentine et le mouvement ne s’arrêtera pas avant de gagner la légalisation. Toutefois, les forces conservatrices qui s’opposent à ce qu’elles qualifient comme relevant d’une «idéologie du genre», progressent elles aussi. Il est indispensable de développer un «postféminisme» visant à encourager divers acteurs sociaux à affronter la menace réactionnaire.
Le poids de la maternité obligatoire et la culpabilité de ne pas vouloir être mère retombent sur les femmes. Les exigences sociales façonnent des représentations qui contraignent les femmes à une maternité forcée en même temps que s’institutionnalise l’idée qu’elles sont chargées de la reproduction. Le débat des groupes féministes sur la légalisation du droit à l’avortement qui se déroule en ce moment en Argentine – et qui dépasse les frontières – rompt ce qui a été établi culturellement. Cela n’est pas suffisant: une loi garantissant le droit à choisir la maternité est nécessaire, elle doit également comprendre une solution aux problèmes en matière de santé publique et d’élargissement des droits.
En Amérique Latine, l’avortement clandestin atteint un niveau alarmant [l’article en lien estime à 6,5 millions les interruptions de grossesse pour la période 2010-2014]. Les femmes qui ne choisissent pas d’être mère vivent les grossesses non désirées comme un processus tortueux. Cette situation les contraint à la clandestinité et à risquer leur vie pour l’éviter. En dépit des données et des statistiques démontrant les risques pour les femmes, les femmes enceintes, les morts et le business illégal autour des avortements clandestins [et les gains de cliniques privées et socialement sélectives], les groupes conservateurs insistent, imposant des idées faisant obstacle à des droits qui devraient être garantis dans une démocratie.
C’est ainsi qu’en Argentine ceux qui se baptisent «pro vie», des secteurs conservateurs de l’Eglise catholique et des évangélistes, ainsi que plusieurs sénateurs et députés, se sont opposés à une loi qui garantit le droit à l’avortement légal, sûr et gratuit. Il faut prendre en considération certains discours diffusés au cours des derniers jours en Argentine ainsi que les réactions en Amérique Latine pour comprendre l’idéologie conservatrice manifestée par ces groupes qui s’efforcent de maintenir les femmes et les femmes enceintes en dehors des conditions fondamentales de la citoyenneté. Continuer la lecture →