GUATEMALA – Scandales et révoltes

(Extraits de l’article de Angel Guerra Cabrera, Rebelion, 28 août 2015 –
Traduction : B. Fieux)

La décision de la Cour Suprême du Guatemala d’ouvrir le processus de jugement préalable du président Otto Pérez Molina, comme responsable d’une gigantesque chaîne de corruption, marque un virage dans la grave crise qui secoue le pays. Le gouvernement paralysé depuis des semaines, semble sur le point de s’effondrer.

Le scandale éclata en avril de cette année et déclencha un mouvement d’indignation qui fut à l’origine de multiples manifestations, d’abord des classes moyennes et des étudiants, puis des autres secteurs de la population, y compris les communautés indigènes combatives, et les paysans.

L’enquête de la Commission Internationale contre l’Impunité au Guatemala (CICIG) a mis en évidence des délits de hauts fonctionnaires du gouvernement, dont la vice-présidente Roxana Baldetti, forcée de démissionner, actuellement en prison, en attente de jugement.

Mais ces faits ne commencent pas avec le gouvernement actuel. Pour les expliquer, il faut aller jusqu’aux racines de l’histoire guatémaltèque et des conséquences de l’ingérence des Etats-Unis dans les affaires internes de ce pays.

A partir du coup d’Etat orchestré en 1954 par la CIA et les plus hautes instances de Washington, qui renversa le président Jacobo Arbenz, le pays fut gouverné par une étroite alliance constituée de l’ambassade états-unienne, du patronat guatémaltèque et des militaires d’extrême droite. Ce fut « l’œuf de serpent » de l’activité contre-insurrectionnelle génocidaire des forces armées jusqu’à la signature des accords de paix avec la guérilla en 1996. Selon la Commission des Faits Historiques de l’ONU, le génocide maya fit 200 000 morts et disparus de cette ethnie, plus un nombre considérable d’opposants politiques et de bases d’appui de la guérilla.

Le génocide est terminé mais pas l’impunité de ses auteurs, dont Pérez Molina, ni les massacres  d’indigènes, ni la répression. Les accords de paix ont ouvert relativement un espace politique avec des élections « à la gringo » mais ont à peine touché à la structure séculaire de domination impérialiste et oligarchique.

Grands patrons, chefs militaires et la grande majorité des hommes politiques se subordonnent à l’ambassade des Etats-Unis et sont complices de celle-ci dans le contrôle de la société civile. De plus, ils participent à de grands négoces nés durant la « guerre sale » et développés ensuite, y compris une juteuse participation au trafic de drogues, à la contrebande et autres activités criminelles.

La rue demande la démission et le jugement de Molina et il est probable qu’elle l’obtienne car elle a déjà réussi à effrayer le patronat qui, du jour au lendemain, s’est mis à exiger la même chose. Et l’ambassade « gringa », à travers les autres instances et la CICIG, tire les ficelles  pour empêcher que le pays lui échappe, et pour que des élections néolibérales « résolvent » le problème pour que tout reste pareil. …

Le ferment d’indignation populaire déclenché leur fait horreur car, s’il parvenait à s’organiser, il pourrait éventuellement se battre pour des changements démocratiques véritables qui déboucheraient sur une Assemblée Constituante citoyenne, et non sur des partis politiques de ce système.…

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