(www.ecoportal.net / www.rebelion.org) : avril 2011
Au bout de 17 ans, la justice d’Equateur a prononcé son jugement contre l’entreprise pétrolière étatsunienne Chevron-Texaco. La sentence émise par le juge Nicolas Zambrano de la Cour de Justice de Nueva Loja établit que l’entreprise est coupable d’avoir pollué une zone forestière de l’Amazonie, comme l’ont dénoncé 1993 habitants indigènes et métis. Une pollution qui a des conséquences sur la santé des habitants.
Durant la période où Texaco (rachetée par Chevron en 2001) a opéré en Equateur, de 1964 à 1992, elle décida, pour faire le maximum de profit, de ne pas utiliser les techniques environnementales standards. Au lieu de réinjecter dans le sous-sol les eaux de formation, elle rejetait des milliers de galons de produits chimiques toxiques et cancérigènes à la superficie.
On a calculé que les dégâts environnementaux causés par 26 années de pollution étaient les plus grands de l’histoire pétrolière. On en parle comme du “ Tchernobyl de l’Amazonie ”. Les dommages sont dix fois pires que ceux du Golfe du Mexique causés par BP et 30 fois plus importants que ceux du fameux bateau Exxon Valdez sur les côtes de l’Alaska. Texaco avait abandonné le pays en 1992, après avoir déversé des milliers de barils d’eaux toxiques dans la forêt équatorienne et laissé 627 piscines pleines de déchets toxiques qui ont affecté trente mille personnes.
En 1993, ces personnes déposaient une plainte dans une Cour fédérale de New-York. Chevron chercha à être jugée en Equateur plutôt qu’aux Etats-Unis, espérant plus de mansuétude des lois équatoriennes. En 2003 le procès contre Chevron commença, confié à la Cour Supérieure de Nueva Loja, dans la province orientale de Sucumbios. Dès lors de nombreuses expertises et inspections judiciaires furent réalisées, qui confirmèrent les dommages. Chevron ne recula devant aucune méthode, allant jusqu’à inventer de prétendus rapports militaires pour présenter les plaignants comme de supposés terroristes.
En février dernier, le juge annonça que la multinationale doit payer huit mille millions de dollars pour les dommages causés, plus 10 % imposés par la Loi sur l’Environnement. En outre la multinationale doit demander pardon publiquement aux victimes de l’Amazonie équatorienne pour le crime commis. Si elle refuse, elle devra verser 100 % de plus du montant établi, soit environ 16 mille millions de dollars.
Bien entendu la compagnie pétrolière annonça aussitôt qu’elle ferait appel de cette décision judiciaire qu’elle juge “ illégitime et inapplicable ”. Depuis le début de l’enquête, Chevron Texaco a mis en jeu tous les types de recours, légaux ou non, et investi des millions de dollars pour tenter de se libérer de cette sentence : elle a embauché des scientifiques mercenaires, monté des dénonciations et des persécutions contre les plaignants, et même interpellé la Cour Internationale de Justice de La Haye.
Derrière ce jugement il y a beaucoup de choses en jeu. Si finalement Chevron verse l’argent imposé par la sentence, ce sera une porte gigantesque qui s’ouvrira, pour tout type de requête, non seulement en Equateur ou en Amérique Latine mais sur toute la planète, contre les nombreuses dégradations de l’environnement générées par des entreprises, pétrolières mais aussi minières, agricoles, énergétiques, et beaucoup d’autres, qui pourraient être jugées pour des dommages similaires.
Chevron-Texaco paiera-t-elle pour les dégâts produits ?
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